#EnBref, PourCeuxQuiSontPressés
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Une nouvelle #lorgnette sur un #LivreAncien par la #VillaBrowna.
Un #AlbumChic de 40 planches du #MondeDAvant14, en #TirageLimité à 300 exemplaires.
Ecrit par #AlbertFlament et dessiné par #Givré, #Sem de #VilleBalnéaire, bientôt #MortPourLaFrance.
On y danse, on y nage, on y reçoit la #ReineDeDinard, l’#InfantLuis-Fernando, le «panache» d’ #AndrédeFouquières.
POUR CEUX QUI N'ONT PAS LE TEMPS NON PLUS MAIS QUI LE PRENNENT
En un album, sous la plume du critique, journaliste, romancier et voyageur Albert Flament (1877-1956) et sous les couleurs de l’illustrateur François de Givré (1887 – 1915), surgit un Dinard au firmament dont l’éclat sera durablement altéré par la Grande guerre, toute proche.
Nous sommes en 1914, mais le bruit des canons ne se fait pas encore entendre. Dinard, en ce début de siècle, ce sont les bals à répétition, les pluies de
jetons de casino, les bains de mer, les courses de chevaux, les sauts de puces
de villa en villa, les gentilles régates, le défilé des élégantes et des fumeurs.
En 25 mini-chapitres dans le gout de La Bruyère et 40 planches, parfois en noir, parfois en couleurs, toujours insolentes, la station balnéaire s’expose dans un défilé des plus débridés.
A tout seigneur, tout honneur. Ouvrons le bal avec la "Reine de Dinard". "Dinard sans Mrs Hugh-Hallett, ce serait Bayreuth sans Wagner, écrit Flament, Brissac sans opéras-bouffes et Venise sans la gondole de la marquise Casati". Voilà qui a le mérite d’être clair ! Encore faut-il savoir à qui nous avons affaire pour comprendre tout ce que contient ce portrait
en creux. Née Emilie von Schaumburg (1) en 1833 à Philadelphie, Mrs
Hughes-Hallett descend d’un colonel allemand parti aux Amériques prêter main
forte à l’Angleterre mise à mal par ses remuantes colonies. Bartholomew
Schaumburg, vite rallié à la cause qu’il était venu combattre, offrit aussi sec
ses services au commandement en chef des forces américaines. Après l’oppresseur
anglais, il combattit les barbares indiens, ce qui ne l’empêcha pas d’épouser
une petite-petite-filliote du chef indien Secaneh. Emilie avait le teint
irlandais et le type délicieusement indien. Elle était "absolute,
and the effect was instantaneous". Si j’ajoute que la mère d’Emilie, une
certaine Miss Page, était d’une beauté époustouflante, vous n’aurez pas de mal
à croire quand je vous affirmerai que le prince de Galles déclara qu’Emilie
était la plus belle femme qu’il ait vu durant sa tournée aux Etats-Unis. "Yes, reconnut la reine balnéaire, it is true that King Edward when he was Prince
of Wales said I was the most beautiful woman in America, but the princes, you,
know, flatter sometimes". La beauté n’empêcha
jamais Emilie d’utiliser sa tête ! Une belle fortune, une parfaite
éducation classique, un scandaleux mari qui eut la bonne idée de passer l’arme
à gauche de bonne heure, tout la poussa vers Dinard dont elle fit sa terre
promise.
En un album, sous la plume du critique, journaliste, romancier et voyageur Albert Flament (1877-1956) et sous les couleurs de l’illustrateur François de Givré (1887 – 1915), surgit un Dinard au firmament dont l’éclat sera durablement altéré par la Grande guerre, toute proche.
Dinard indoor |
En 25 mini-chapitres dans le gout de La Bruyère et 40 planches, parfois en noir, parfois en couleurs, toujours insolentes, la station balnéaire s’expose dans un défilé des plus débridés.
A tout seigneur, tout honneur. Ouvrons le bal avec la "Reine de Dinard". "Dinard sans Mrs Hugh-Hallett, ce serait Bayreuth sans Wagner, écrit Flament, Brissac sans opéras-bouffes et Venise sans la gondole de la marquise Casati". Voilà qui a le mérite d’être clair ! Encore faut-il savoir à qui nous avons affaire pour comprendre tout ce que contient ce portrait
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Dinard outdoor. Photographie |
Eh bien dansez
maintenant !
Cela étant dit, vous risquez d’avoir un choc en découvrant l’Emilie que Givré dessine dans l’album, à deux
reprises. La reine de 80 ans à première vue
décatie, y révèle toutefois une santé insolente qui lui permet sur l’une
des planches de danser le cake-walk. Elle qui fut une incomparable patineuse
sur glace, une dingue de fox-trot, donna d’innombrables bals à la villa Monplaisir
qu’elle avait fait agrandir d’une pharaonique salle de bal.
En aout 1913, elle organisa une soirée "sans conteste la plus brillante de la saison", en l'honneur du Prince et de la Princesse Louis d'Orléans et Bragance qui se termina en un "tour de valse et un cotillon mené par M. André de Fouquières" que Givré caricature et sans prendre de pincettes encore ! Ah Fouquières ! L’homme aux 50 ans de panache. "Dinard, qui, décidément, a toutes les chances, a écrit le journaliste Jean Vignaud, a mis M. André de Fouquières comme un gardénia à sa boutonnière". Il ajoute que "le Tout Dinard fait naturellement comme M. de Fouquières. Le temps qu'il ne dépense pas sur les courts de tennis, les terrains de golf et le champ de courses du bois Thomelin, où règne M. Jean Hennessy, il le passe au Casino. Si tous les chemins de France mènent à Rome, tous ceux d'Angleterre et d'Amérique conduisent au Casino de Dinard".
Cela étant dit, vous risquez d’avoir un choc en découvrant l’Emilie que Givré dessine dans l’album, à deux
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La même, à 60 ans d'intervalle |
En aout 1913, elle organisa une soirée "sans conteste la plus brillante de la saison", en l'honneur du Prince et de la Princesse Louis d'Orléans et Bragance qui se termina en un "tour de valse et un cotillon mené par M. André de Fouquières" que Givré caricature et sans prendre de pincettes encore ! Ah Fouquières ! L’homme aux 50 ans de panache. "Dinard, qui, décidément, a toutes les chances, a écrit le journaliste Jean Vignaud, a mis M. André de Fouquières comme un gardénia à sa boutonnière". Il ajoute que "le Tout Dinard fait naturellement comme M. de Fouquières. Le temps qu'il ne dépense pas sur les courts de tennis, les terrains de golf et le champ de courses du bois Thomelin, où règne M. Jean Hennessy, il le passe au Casino. Si tous les chemins de France mènent à Rome, tous ceux d'Angleterre et d'Amérique conduisent au Casino de Dinard".
Hugh-Hallett et Fouquières |
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Maxixe brésilienne, cheek to cheek |
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La salle de bal de Monplaisir |
Givré, de son trait malicieux rappelle que la danse fut aussi une des grandes
affaires dinardaises. Elle accapare les pages de l’album. On éreintait chaque
soir les parquets des villas. On organisait même des concours de danse.
En septembre 1913 (2), l’un d’eux "donné au Casino, fut des plus brillants
[qui] attira une assistance considérable venue de Dinard et des environs, on se
serait cru en vérité au cœur de la saison". On trouva dans la composition
jury, cela ne nous étonnera pas, André de Fouquières, mais aussi le vicomte de
Jessaint, le baron E. de Dorlodot, M. Hardy-Thé, M. Georges-Henri Manuel, M. de
Delgado y Heredia, qui jalonnent l’album de Flament et Givré, au même titre que
certains des participants du concours : miss King qui ce jour-là est
récompensé pour un one step; le vicomte Xavier de La Villesbrunne repéré
pour son sens du tango, M. Trotti et Mlle Bettini que Givré représente
fesses en l’air, front contre front dans une maxixe – prononcez machiche
- brésilienne, qu’il renomme "braccice maxiliene" sans que nous
ayons pu en trouver la raison. Y participa aussi, M. de Chevriers que le
dessinateur – l’analogie est facile – plante au milieu d’un troupeau de chèvres
qui s’empiffrent de l’herbe des alpages. Affublé d’une culotte et d’un chapeau
tyroliens, il a un brin l’air "crétin des Alpes".
Au bal masqué, ohé, ohé
Au bal masqué, ohé, ohé
Chevriers en crétin des Alpes |
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Manuel en bergère barbue |
Il n’y a pas que Chevriers qui soit déguisé au fil des planches. Un autre danseur, Georges-Henri Manuel, ami de Toulouse Lautrec, "personnage bizarre, sorte de mondain omnibus qui […] porte une longue tête écarquillée, en haut d'un cou de trente centimètres, que parcourt une pomme d'Adam semblable à un ludion" (3) est dessiné en bergère barbue du XVIIIe s.
Il faut dire qu’en France, le bal costumé fait rage en cette fin de Belle époque qui n’a peur de rien, même pas du ridicule. Ainsi en 1912 (4), les Vlassov "donnaient un bal costumé des plus gais. Les dames portaient un costume en papier représentant des fleurs, et les hommes un costume également en papier représentant des légumes". Bah voyons ! Parmi les invités, l’inoxidable Fouquières et des patriciens dinardais, Kotchoubey, Jessaint, Récopé, La Villesbrunne, Hardy-Thé, Le Gorrec qui ont forgé à grands coups de nuits blanches, le chic de la ville.
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L'infant Luis-Fernando, mignon de Dinard |
Dinard, centre du beau Monde
L’Espagne, l’Amérique, l’Angleterre si présente et pour cause – "consultez votre carte, vous y verrez que Dinard se
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Holman Black |
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Héritage d'attelage |
Car c’est comme ça à Dinard, on se recevait à qui mieux mieux, quand on ne se retrouvait pas au sortir des cabanes de la plage, au casino, sur les terrains de tennis, sur le deck des sveltes voiliers ou sur le champ de course. L’introduction de Flament vante tous les délices que la ville balnéaire procure. Givré prendgarde a bien mettre en fond de caricature ces terrains de jeu divers. Une
une "belle fille qui n'avait pas peur d'aller prendre son bain" |
Sur la plage abandonnée
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Déplorer la perte de l'été |
L’insouciance des 39 premières caricatures de l’album tranche avec la
solitude silencieuse de la dernière qu’on ne peut s’empêcher de qualifier de
prophétique. On y voit un personnage habillé en croque-mort en train de creuser
une tombe, celle de "l’Eté à Dinard" comme on peut le lire sur le
ruban qui barre la couronne mortuaire toute proche. Je sais. Vous allez me dire
que nous sommes dans une métaphore à la gomme digne de celle que BB chantait.
"Sur la plage abandonnée, coquillage et crustacés, Qui l'eût cru déplorent
la perte de l'été, Qui depuis s'en est allé. On a rangé les vacances, dans des
valises en carton". Oui, mais voilà. Si Brigitte sait bien que
"l'année prochaine, tout refleurira, nous reviendrons", Givré et
Flament ignorent que ce n’est pas la saison qu’ils enterrent mais bel et bien
une époque tout entière.
L’album est sorti des presses en mars 14. Août n’est pas loin. François de Givré, qui n'a pas manqué de se caricaturer dans Dinard, mourra en 1915, sous-lieutenant de 28 ans, fauché avec la plus grande partie de sa compagnie "après avoir franchi dans un élan admirable trois lignes de tranchées ennemies". En 1919, Isabelle Rochaïd, fille de Joseph Rochaïd, se fiancera avec le marquis de Drée, sous-lieutenant au 37e régiment d'infanterie, décoré de la croix de guerre. "La jeune fiancée est la fille de la
comtesse Rochaïd, décédée des suites d'une maladie contractée au
chevet des blessés à l'hôpital qu'elle dirigeait à Dinard en qualité
d'infirmière-major". Charles Holman-Black, qui jusque-là avait donné sa
vie de patachon à l’art, aux plaisirs et à la gaieté, tournera casaque. Dès le
30 octobre 1914, il donne un long article au Day de Londres, contant ses exodes de début de guerre et exhortant
les lecteurs à envoyer de l’argent à la banque Boutin de Dinard pour acheter
des cigarettes aux soldats (5). Gertrude Atherton (6) se souviendra que « she never received from any
the same sense of consecration, of absolute selflessness as [she] did from Mr.
Holman-Black. […] Mr. Holman-Black is parrain (godfather) to three hundred and
twenty soldiers at the Front, not only providing them with winter and summer
underclothing, bedding, sleeping-suits, socks, and all the lighter articles
they have the privilege of asking for, but also writing from fifteen to twenty
letters to his filleuls daily. He, too, has not taken a day's vacation since
the outbreak of the war, nor read a book.”
De retour à Dinard après la guerre, il aura sans doute rouvert avec une profonde émotion, cet album de fantômes, ce témoignage d’un temps que les moins de vingt ne pourraient plus connaitre. © texte et illustrations villa browna / Valentine del Moral.
L’album est sorti des presses en mars 14. Août n’est pas loin. François de Givré, qui n'a pas manqué de se caricaturer dans Dinard, mourra en 1915, sous-lieutenant de 28 ans, fauché avec la plus grande partie de sa compagnie "après avoir franchi dans un élan admirable trois lignes de tranchées ennemies". En 1919, Isabelle Rochaïd, fille de Joseph Rochaïd, se fiancera avec le marquis de Drée, sous-lieutenant au 37e régiment d'infanterie, décoré de la croix de guerre. "La jeune fiancée est la fille de la
Givré par lui-même |
De retour à Dinard après la guerre, il aura sans doute rouvert avec une profonde émotion, cet album de fantômes, ce témoignage d’un temps que les moins de vingt ne pourraient plus connaitre. © texte et illustrations villa browna / Valentine del Moral.
LE LIVRE QUI A PERMIS D’ÉCRIRE CETTE
LORGNETTE est en vente à la librairie:
FLAMENT, Albert | GIVRÉ, François de. Dinard.
Paris, imprimerie Maquet, 1914.
In-folio, livret et feuilles sous chemise cartonnée, dos toilé, couverture illustrée en couleurs. 16 pages de texte reliées par un cordon vert et 40 planches.
Tirage limité à 300 exemplaires, exemplaire numéroté à la main par Givré.
Rare album en bel état et bien complet des 40 planches dont cinq doubles, en noir et couleurs.
On trouve au dos d’un bon nombre de ces très amusantes caricatures, inscrits au crayon, le nom des personnes croquées. Commander le livre. En savoir plus
Paris, imprimerie Maquet, 1914.
In-folio, livret et feuilles sous chemise cartonnée, dos toilé, couverture illustrée en couleurs. 16 pages de texte reliées par un cordon vert et 40 planches.
Tirage limité à 300 exemplaires, exemplaire numéroté à la main par Givré.
Rare album en bel état et bien complet des 40 planches dont cinq doubles, en noir et couleurs.
On trouve au dos d’un bon nombre de ces très amusantes caricatures, inscrits au crayon, le nom des personnes croquées. Commander le livre. En savoir plus
NOTES
(1) Peacock, Virginia Tatnal. Famous American Belles of the Nineteenth Century. K. B. Lippincott Company. 1901
(2) Le Figaro, 1913-09-03 -
(3) Léon Daudet, L'entre-deux-guerres -
(4) Le Figaro, 1912 -
(5) https://news.google.com/newspapers?nid=1915&dat=19141030&id=nfogAAAAIBAJ&sjid=b3UFAAAAIBAJ&pg=3523,6678397&hl=fr
(6) Gertrude Atherton, The Living Present, 1917.
(1) Peacock, Virginia Tatnal. Famous American Belles of the Nineteenth Century. K. B. Lippincott Company. 1901
(2) Le Figaro, 1913-09-03 -
(3) Léon Daudet, L'entre-deux-guerres -
(4) Le Figaro, 1912 -
(5) https://news.google.com/newspapers?nid=1915&dat=19141030&id=nfogAAAAIBAJ&sjid=b3UFAAAAIBAJ&pg=3523,6678397&hl=fr
(6) Gertrude Atherton, The Living Present, 1917.