#PourCeuxQuiSontPressés
#DelAmourAuGrandTrot #BaisodromeAttelé
#ErotismeDesFiacres
#DesVentsDesPetsDesPoums
#FlaubertCuisinMêmeCombat
#EauEtGazàToutesLesEtapes
Pour ceux qui n'ont pas non plus le temps, mais qui le prennent quand même.
#ErotismeDesFiacres
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#FlaubertCuisinMêmeCombat
#EauEtGazàToutesLesEtapes
détail du frontispice dépliant |
Pour ceux qui n'ont pas non plus le temps, mais qui le prennent quand même.
Qui diable se
cache derrière ces prodigieux pseudonymes-pour-rire au milieu desquels nous
trouvons une victime
de la tyrannie de Napoléon Bonaparte, un parasite logé à Pouf dans un grenier, un écouteur aux
portes, un dessinateur au charbon et un enlumineur à la litharges, un
rôdeur caché dans un arbre creux du bois de Boulogne, une victimes des femmes
entretenues un lynx magicien, un homme qui s'est marié sept fois, une
société d'agriculteurs ?
La Folie mène le cortège |
Voyez comme le Fripon mène tout l'équipage galant. |
C’est en tout
cas ce que veut faire croire Cuisin dans le préambule de son petit volume au
titre gigantesque : L’Amour au grand
trot, ou la Gaudriole en diligence, manuel portatif et guide très-précieux pour
les voyageurs offrant une série de voyages galans en France et à l’étranger
ainsi qu’une foule de révélations piquantes de tous les larcins d’amour bonnes
fortunes espiègleries aventures extraordinaires dont les voitures publiques
sont si souvent le théâtre. Par M Vélocifère grand amateur de messageries. Il
y écrit: « Allons, vous voilà
bien avertis, époux, mères, filles et jeunes-gens. Vous ne pourrez pas dire
qu’aucun moraliste officieux ne vous ait point signalé les écueils. Mais
hélas ! On le sait que trop c’est prêcher dans le désert ; il faut
que jeunesse se passe.»
A la lecture de
ce livre très amusant, on est cependant en droit de douter de
ce «camelotier prolifique, auteur de colportage, polygraphe paillard ou
édifiant, [… aux] ouvrages toujours teintés d’une ambition morale, feinte ou
véritable […et] aux titres programmatifs quelque peu hypertrophiés, presque
hystériques ou plutôt frénétiques, qui attestent d’une manière d’appel qui est
celle du bonimenteur des spectacles de la foire » (1). Et on aura raison.
Si «l’immoralité » du contenu
l’a fait mettre à l’index par mesure de police en 1825, c’est que Cuisin a eu
beau user de périphrases et d’images plus alambiquées les unes que les autres,
on voyait trop bien où il voulait en venir. Un exemple : alors que la
belle Elisa est assoupie – ou fait mine de l’être – dans la voiture de poste
qui transporte également le narrateur, comme par hasard, sa poitrine se
découvre. « C’est pour le coup qu’en plein jour, raconte le jeune homme, j’eus
été obligé de croiser ma redingote ! Toutes les cordes de la volupté
étaient tendues en moi […] Je brûlais de lui donner enfin une leçon
d’astronomie, dans laquelle elle ne perdit pas de vue l’aiguille aimantée ; ainsi partant du département du
Mont-Blanc et pénétrant jusqu’à celui de l’Aisne, je m’enivrai de mille délices
en prenant possession d’une île nouvelle, que peu de navigateurs avaient
abordée, à en juger par la difficulté de l’entrée au port ». Les
diligences permettaient réellement ce que Meetic et la farandole des réseaux
sociaux n’agréent que virtuellement aujourd’hui : du badinage express. Les
genoux qui s’entrecroisaient, les cuisses qui se frottaient ont laissé place
aux chapelets de smileys et aux photos de profil. « L’émoi du vécu »
a été remplacé par le « Et moi, me likeras-tu ? » Entre la voiture à
cheval et la fibre numérique, il y eut bien le train, concentré d'érotisme à
vapeur qu'Apollinaire fit tenir tout entier dans un wagon des Onze mille
verges. Raymond Loewy, celui qui modela dans les années 30 les sublimes
locomotives de la Pennsylvania Railroad, avouait pour sa part dans La
laideur se vend mal, que rien ne lui paraissait plus torride que la
rencontre d'une femme seule dans un train en marche.
Fleurettes et papillons légers |
Mais aujourd’hui le déplacement des Hommes est en passe d'être supplanté
par le mouvement de la fibre optique. C’est d’autant plus dommage que la
littérature doit beaucoup aux salles obscures sur roues que furent les voitures
à cheval. Si dans Madame Bovary, Flaubert
a placé la mise en jambes d’Emma et Léon dans un fiacre, c’est loin d’être
innocent comme le prouve le passage d’une lettre célèbre de l’écrivain à Louise
Colet datée du 29 novembre 1853 : « As-tu réfléchi quelquefois à toute
l'importance qu'a le Vi dans l'existence parisienne ? Quel commerce de
billets, de rendez-vous, de fiacres stationnant au coin des rues, stores
baissés ! Le Phallus est la pierre d'aimant qui dirige toutes les
navigations. » L'aiguille aimantée de Cuisin et la pierre
d'aimant de Flaubert indiquent sans flancher le même mont de Vénus. Sorti en 1857,
le roman, comme la pochade de M. Vélocifère vingt ans plus tôt, connut les
démêlés judiciaires que l’on sait. Encore en 1888, le Fiacre émoustille.
Xanroff en fait une chanson, reprise par Mireille et Brassens, qui n’a pas pris
une ride : « Un fiacre allait, trottinant /Cahin, caha / Hue, dia,
hop là!/ Un fiacre allait, trottinant /Jaune, avec un cocher blanc. »
Dedans, stores baissés, une femme et son amant. Le mari qui, du trottoir,
reconnait la voix de sa femme, de surprise, tombe et se tue. Du fiacre une dame
sort et dit: « Chouette, Léon! C'est mon mari! Y a plus besoin de nous
cacher ». Et la belle de faire renvoyer le fiacre. Laissant flotter dans l'atmosphère
l’hommage discret, par Léon interposés, du chansonnier au père de Madame
Bovary.
Six fois prout |
Hymen consterné |
Il faut attribuer cette pointe sèche à Pierre-Jean-Baptiste-Isidore Choquet, (1774-1824), miniaturiste et illustrateur, qui multiplia les scènes mythologiques dont plus d’une vingtaine sont conservées au Rijksmuseum. Jules Gay (2) a beau vouloir que ce soit un certain Choquet de Lindu, officier et architecte de la Marine qui l’ait composée, ça ne colle pas. Le brave militaire mourut en 1790 et s’intéressa plus aux murs de bagnes qu’aux portières de diligences. De surcroît, la vente de cette gravure intitulée Voyez comme le fripon vous mène tout l’équipage galant fut orchestrée en 1820 par « Mme Lepetit, rue Hautefeuille, n 3o ». Outre le fait que le titre à rallonge de la gravure est bien dans le goût de Cuisin, Mme Lepetit se trouve être l’éditeur de L’Amour au grand trot. Pour enfoncer le clou, Choquet est aussi l’auteur avéré des très intéressantes illustrations des Ombres Sanglantes (3), merveille de nouvelles noires que Cuisin fait paraitre en 1820 chez la même éditrice. La drôlerie des personnages que l’on surprend à se bécoter, donner la tétée, vider leur pot de chambre, se boucher le nez dans les deux diligences, la finesse du détail des malles, des cages à oiseaux, des nuages de poussière finissent de nous convaincre de l’excellence de la main qui a inventé la scénette.
Autorisée à publication en juillet
1820, la gravure se retrouva-t-elle mise à l’index avec le volume en
1825 ? Voilà un paradoxe éditorial qui dut bien amuser notre écrivain qui
s’autoportraitisa avec humour dans le Dictionnaire
des gens de lettres vivants, par un descendant de Rivarol, paru en 1826 et
dont il fut un des deux auteurs cachés. Cela donne : « CUISIN (J.
P.) : Cet auteur est un véritable modèle de versatilité; on ne peut lui
refuser quelque esprit, quelque chaleur d'imagination, mais la sagesse n'en
règle jamais les bonds, les soubresauts et les saccades. Ses principaux
trophées sont des in-18 d'un style parfois érotique avec des mœurs pures, de la
probité, il a allié ce contraste adultère […] la postérité ne prononcera jamais
le mot de camelote, sans qu'une réminiscence ne le signale comme un de ses
coryphées les plus chauds. Voilà l'opinion, c'est une reine tyrannique, qui ne
revient jamais de ses révélations, de ses jugements ERRONÉS, telle chose que
vous fassiez pour réparer des erreurs littéraires de jeunesse ». Dans
l’article consacré à Gilbert, on y lit aussi que « si Gilbert, ainsi que Cuisin
étaient condamnés à porter tous leurs ouvrages, vraiment ils succomberaient
sous leur poids ». En ce qui nous concerne, nous, nous avons en tout cas
succombé à son charme. © texte et illustrations
villa browna / Valentine del Moral
LE LIVRE QUI A PERMIS D’ÉCRIRE CETTE LORGNETTE est en vente à la librairie
M. Vélocifère, grand amateur de
messageries. [J.P.R. Cuisin]
L’Amour au grand trot, ou la Gaudriole en diligence. Par M. Vélocifère, grand amateur de messageries. Paris, chez les principaux Libraires du Palais-Royal, an du plaisir au galop 1820.
L’Amour au grand trot, ou la Gaudriole en diligence. Par M. Vélocifère, grand amateur de messageries. Paris, chez les principaux Libraires du Palais-Royal, an du plaisir au galop 1820.
Paris, chez les principaux libraires du palais-Royal,
an du plaisir au galop, 1820.
In-18, plein papier postérieur vert, dos lisse. Frontispice dépliant, faux-titre, titre, 278 pp.
Édition originale de cette succession de tableaux lestes qui ont pour cadre les diligences du début du XIXe s. En frontispice, « Voyez comme le fripon mène tout l'équipage galant », une grande et fine pointe sèche par Choquet.
In-18, plein papier postérieur vert, dos lisse. Frontispice dépliant, faux-titre, titre, 278 pp.
Édition originale de cette succession de tableaux lestes qui ont pour cadre les diligences du début du XIXe s. En frontispice, « Voyez comme le fripon mène tout l'équipage galant », une grande et fine pointe sèche par Choquet.
NOTES
(1) Le
spectre et la camelote Clichés du roman noir en mouvement - Marie-Laure Delmas
(2) Iconographie des estampes a sujets galants et des portraits de femmes... Par Jules Gay
(3) Pour le plaisir, le titre en entier du volume : Ombres Sanglantes, galerie funèbre de prodiges, événements merveilleux, apparitions nocturnes, songes épouvantables, délits mystérieux, phénomènes terribles, forfaits historiques, cadavres mobiles, têtes ensanglantées et animées, vengeances atroces et combinaisons de crimes, etc.
(2) Iconographie des estampes a sujets galants et des portraits de femmes... Par Jules Gay
(3) Pour le plaisir, le titre en entier du volume : Ombres Sanglantes, galerie funèbre de prodiges, événements merveilleux, apparitions nocturnes, songes épouvantables, délits mystérieux, phénomènes terribles, forfaits historiques, cadavres mobiles, têtes ensanglantées et animées, vengeances atroces et combinaisons de crimes, etc.